PARU LE 20 NOVEMBRE 2020
Le Lutin de Stuttgart est un conte de l'un des plus grands poètes du romantisme allemand, considéré comme un classique du genre. C'est l'une des toutes dernières oeuvres d'Eduard Mörike, qui écrivit encore ensuite sa plus célèbre nouvelle, Le Voyage de Mozart à Prague, puis cessa d'écrire durant les vingt dernières années de sa vie. C'est aussi, de ce fait, l'un des tout derniers contes romantiques de la littérature allemande, publié à la fin d'un demi-siècle qui vit éclore une étonnante moisson de chefs-d’œuvre, des célèbres Contes des frères Grimm aux contes d'Arnim, Tieck ou Brentano.
Seppe, un apprenti cordonnier de Stuttgart, se déplaît chez son maître et décide de voir du pays. Il quitte sa ville natale et part à la découverte du vaste monde. En fait, il ne s'éloignera pas beaucoup de sa région natale, la Souabe, et le conte de Mörike est aussi un hommage à ce pays dont les paysages, les traditions locales ou la sagesse populaire et les proverbes sont évoqués avec tendresse au fil des pages.
La veille du départ de Seppe, un lutin malicieux, lui-même fort savant cordonnier, lui apparaît et lui offre quelques présents magiques destinés à l'accompagner dans son voyage et à lui porter chance. Le conte se compose de plusieurs histoires enchâssées où ces objets, et plusieurs autres encore, vont jouer un grand rôle. L'art avec lequel Mörike, multipliant les épisodes tantôt émouvants, tantôt burlesques, tantôt féeriques, a ménagé la convergence des différentes intrigues, est particulièrement virtuose. Magistral aussi, son art de la narration qui conduit le lecteur de surprise en surprise.
Très connu en Allemagne où il est lu aussi bien par les enfants à l'école que par les adultes qui en goûtent la saveur folklorique, la sagesse profonde et la beauté, ce conte n'avait encore jamais été traduit en français. Pour illustrer cette première traduction, nous avons choisi les illustrations d'une édition berlinoise du début du XXe siècle en forme d'ombres chinoises, particulièrement en harmonie avec l'esprit de la narration qui fait volontiers référence aux traditions du carnaval et au théâtre pour marionnettes.
Eduard Mörike (1804-1875), qui fut pasteur luthérien puis professeur de grec dans un lycée de jeunes filles, est surtout connu en France comme l'auteur du Voyage de Mozart à Prague, mais ses poèmes ont connu plusieurs traductions françaises (la plus récente en 2010, par Nicole Taubes, aux éditions Les Belles Lettres). Ils sont célèbres auprès des mélomanes pour avoir été mis en musique par Schumann, Brahms ou Hugo Wolf, notamment. Son roman Le Peintre Nolten, intégralement traduit par Louise Servicen, figure dans le second des deux volumes de la Bibliothèque de la Pléiade consacré aux Romantiques allemands.
Jean-Yves Masson, traducteur de ce conte, a publié une anthologie bilingue des poèmes de Mörike dans la collection "Orphée" aux éditions de la Différence (Chant de Weyla et autres poèmes, 2012).